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Soutenance de thèse

Soutenance de thèse de Héloïse Athéa

Date de soutenance prévue le 26 novembre 2024 à 14h00.

Une enquête philosophique sur les modèles animaux. Des questions fondamentales à la modélisation et aux traitements des pathologies psychiatriques

Directeurs de thèse : Denis Forest, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne, Sorbonne Université, co-directeur de thèse

Composition du jury : 

  • Marcel WEBER, Université de Genève, rapporteur
  • Serge AHMED, Université de Bordeaux, rapporteur
  • Anouk BARBEROUSSE, Sorbonne Université, examinatrice
  • Lucie LAPLANE, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne, examinatrice
  • Claire MARTIN, Université Paris Cité, examinatrice

Résumé de la thèse :
Au cours des dernières décennies, les modèles animaux non humains ont permis de mettre en évidence une grande quantité de cibles pharmacologiques dans beaucoup de domaines thérapeutiques différents. Malheureusement, leur utilisation en clinique humaine n’a pas donné les résultats escomptés : tous domaines thérapeutiques confondus, neuf médicaments candidats sur dix échouent au cours des essais cliniques et de l’autorisation de mise sur le marché, cette probabilité étant encore plus élevée pour les médicaments qui concernent le système nerveux. Ces résultats décevants peuvent être expliqués par au moins deux facteurs : soit ce sont les essais cliniques qui n'ont pas permis de détecter les effets de ces nouveaux médicaments, soit ce sont les modèles animaux qui n'ont pas permis d’évaluer correctement l'efficacité clinique des traitements. Dans le second cas, les modèles animaux peuvent modéliser la pathologie de manière partielle ou erronée, ce qui signifie qu’il faudrait affiner les modèles animaux eux-mêmes, les protocoles expérimentaux qui y sont associés et les concepts employés lors de l’interprétation des résultats. C’est à ce deuxième aspect que nous nous intéressons au cours de ce travail. En particulier, notre objectif est de proposer des outils conceptuels à destination de la communauté scientifique pour évaluer et analyser ces modèles et les connaissances qu’ils nous permettent de produire, avec l'espoir de contribuer à leur amélioration.
Afin d'atteindre cet objectif, nous adoptons une approche qui se situe à l’intersection des neurosciences et de la philosophie, et structurons notre travail autour de trois questions clés. D’abord, une question générale qui s’inscrit dans le contexte de l’épistémologie des modèles : quelles sont les spécificités épistémiques et pratiques de la modélisation animale par rapport aux autres modèles scientifiques, et comment évaluer ces modèles ? A partir de ces spécificités, et en nous inspirant de ce qui a été proposé pour des modèles particuliers, nous proposons un ensemble inédit de critères de validité, applicables en principe à tous les modèles animaux, voire, à tous les organismes modèles.
Par la suite, nous montrons que ces concepts généraux sont appropriés pour décrire des cas particuliers. Notre premier cas d’étude est un modèle issu du domaine de la neuropharmacologie : un modèle rat d’addiction influent, le modèle des trois critères. Ses auteurs affirment qu’ils auraient réussi à produire de véritables « rats addicts », montrant par-là que l’addiction ne serait pas un phénomène spécifiquement humain. Ainsi, la deuxième question qui nous occupe est la suivante : quels sont les arguments expérimentaux et logiques qui soutiennent le modèle des trois critères, et sont-ils justifiés ?
Dans cette étude comme dans d’autres travaux de recherche visant à modéliser des pathologies, les objectifs épistémiques ne sont jamais loin de celui de l’amélioration thérapeutique : en comprenant la pathologie ou les mécanismes des traitements qui fonctionnent déjà en clinique, on espère pouvoir développer de nouvelles pistes thérapeutiques par le biais de ces modèles animaux. C’est pourquoi, nous terminons ce travail en examinant la manière dont ces modèles peuvent nous permettre de développer des pistes thérapeutiques prometteuses. Nous prenons cette fois pour exemple un modèle murin comportemental des effets psychédéliques - des substances prometteuses pour traiter l’addiction, sans que l’on sache encore expliquer leurs effets. Une hypothèse en vogue est que l’expérience psychédélique subjective serait en elle-même cruciale pour obtenir des effets thérapeutiques. Les modèles comportementaux disponibles, basés essentiellement sur la mesure de comportements non spécifiques, étant très rudimentaires, la dernière question à laquelle nous tentons de répondre est : quel modèle murin élaborer dans un contexte thérapeutique où l’expérience psychédélique subjective semble centrale ?