Projet CLONE (Projet Cancéropôle Emergence)
Lucie Laplane
Projet CLONE (Projet Cancéropôle Emergence)
"Analyse philosophique et expérimentale des dynamiques clonales"
Du 01.01.2021 au 31.12.2021
Partenaires : Leïla Perié (CNRS, Institut Curie) and Alessandro Donada (Post-doc) ; Stephane de Botton et Christophe Willekens (Hématologue, Gustave Roussy)
Description : Le projet CLONE est un projet interdisciplinaire (philosophie, biologie et clinique) portant sur l’hétérogénéité intra-tumorale et son évolution au cours du temps. Le projet repose sur les prémices suivantes :
- les tumeurs malignes sont constituées de cellules hétérogènes
- cette hétérogénéité se joue à plusieurs niveaux (génétique, épigénétique, transcriptomique, phénotypique…).
- les populations de cellules cancéreuses évoluent par sélection naturelle.
- la sélection naturelle porte sur les cellules : certaines cellules prolifèrent plus et survivent mieux que d’autres, en fonction de leurs propriétés et des pressions de sélection dans un environnement donné.
Ces prémices soulèvent une question : qu’est-ce qui fait qu’un groupe de cellules (un clone) émerge ? La génétique offre une partie au moins de la réponse : certaines mutations peuvent augmenter l’avantage prolifératif des cellules et/ou leur résistance à certains traitements. Le modèle de l’évolution clonale est d’ailleurs principalement basé sur l’observation des mutations. Mais les mutations n’expliquent pas toujours tout. Par exemple, dans certains cancers comme les ependymomes, les mutations présentes ne permettent pas d’expliquer le développement de la tumeur, ce sont plutôt certaines altérations épigénétiques qui semblent expliquer l’émergence de la maladie et permettent une stratification efficace des patients. Dans les leucémies, même quand des mutations drivers sont bien identifiées, il existe des situations cliniques qui échappent à l’explication génétique. Par exemple, certains patients avec une leucémie aiguë myéloïde (LAM) traités avec des inhibiteurs d’IDH répondent au traitement tout en conservant le clone porteur de la mutation d’IDH1 ou IDH2. Ces situations cliniques nécessitent de dépasser le cadre génétique de l’évolution clonale. De nombreux outils permettent maintenant d’explorer l’épigénétique, la transcriptomique, la protéomique, etc. Mais comment choisir ? Du point de vue de l’évolution par sélection naturelle, tous les traits héritables qui contribuent au phénotype des cellules participent à l’évolution clonale. Mais l’identification des clones à travers différents traits, par exemple des mutations ou des altérations épigénétiques, ne donne pas lieu au même découpage : les cellules qui appartiennent à un clone génétique n’appartiennent pas forcément au même clone épigénétique. Autrement dit, il peut y avoir des compétitions intra-clonales, par exemple entre des clones épigénétiques au sein de clones génétiques. Ces phénomènes sont masqués à l’échelle exclusivement génétique. Face à cette difficulté, notre objectif est de proposer une nouvelle conception des dynamiques clonales capable d’incorporer la multiplicité des traits contribuant aux dynamiques évolutives. Pour cela, nous proposons de combiner des approches expérimentales et philosophiques. Sur le plan philosophique, nous proposerons d’une part une clarification du concept de clone telle qu’il est actuellement utilisé et d’autre part une révision plus profonde de ce concept et de son utilisation. Sur le plan expérimental, nous utiliserons des technologies innovantes qui permettent de regarder le comportement des cellules uniques et de leurs descendances puis de comparer ces différentes dynamiques familiales avec le profil génétique des cellules. Nous appliquerons ces techniques à des cellules issues de patients atteints de LAM avant/après traitement par inhibiteur d’IDH. Cela nous permettra d’évaluer l’hétérogénéité des dynamiques cellules à l’intérieurs et entre les clones génétiques et d’évaluer le rôle de ces dynamiques dans la réponse au traitement.